Berthe Petit et les prophéties des deux Guerres Mondiales

Assez peu connue de nos jours mais prise très au sérieux par plusieurs évêques et cardinaux de son vivant, dont les Primats de Belgique et d'Angleterre, la voyante belge Berthe Petit (1870-1943) reçut beaucoup de locutions en lien avec les évènements dramatiques de son temps, notamment au sujet des deux Guerres Mondiales. Si nous croyons à la bonne foi de ceux qui ont daté ses messages, il est difficile d'en contester le caractère prophétique.

Le 12 septembre 1912, Berthe assiste au Congrès Eucharistique de Vienne tenu en présence de l'Empéreur Franz-Josef d'Autriche-Hongrie. Lors de son action de grâces, elle entend la voix de Jésus :

"Un double meurtre abattra le successeur du vieux souverain, fidèle à sa foi. Ce sera le premier des événements, douloureux mais utiles à Mes vues, qui précéderont le châtiment..." [1]

Le 28 juin 1914, Gavrilo Princip assassine l'archiduc Franz Ferdinand et sa femme à Sarajevo, accomplissant la prophétie de Berthe à la lettre et déclenchant la Première Guerre Mondiale. Le lendemain la mystique belge entend :

(Jésus): "A partir de ce moment commence la marche ascendante des événements avant-coureurs, qui vont vous conduire à la grande manifestation de ma Justice." [2]

L'Autriche, soutenue par l'Allemagne, déclare la guerre contre la Serbie le 28 juillet. Le 29, Berthe reçoit un nouveau message, cette fois concernant le Kaiser Wilhelm II - les mots semblent prédire des hostilités de grande ampleur et de longue durée, prononcés à un moment où la plupart des hommes politiques et leaders militaires prévoyaient plutôt une "guerre éclair" (Blitzkrieg) :

"Son indomptable orgueil déchaîne un fléau dont vous ne pouvez prévoir l'étendue. Il permettra tous les ravages, s'autorisant de Mon Nom, tandis que sa haine et son ambition seules, sont en cause. Mais Je briserai son fer et son orgueil. Le ciel sera aux innocentes victimes, et bien des âmes se tourneront à jamais vers Moi." [3]

Le 6 août, juste après l'invasion de la Belgique par l'Allemagne, le Seigneur continue en prophétisant l'issue de la guerre :

"Je maudis les peuples superbes qui me méconnaissent et persécutent la vraie foi (tout en abusant de Mon Nom et en s'en autorisant). La nation qui déverse injustement ses forces, depuis longtemps préparées, sur la meilleure part de Mon troupeau, et qui passera, pour la purification des peuples, comme un fléau cruellement meutrier et destructeur, n'ést pas la nation de Mon choix. Je la briserai et la châtierai, parce que, dans son orgueil insensé, elle nie sa propre déchéance religieuse et morale. C'est dans l'écrasement de cet orgueil que se produira Mon châtiment." [4]

Le 20 août 1914, les Allemands entrent à Bruxelles. Le même jour, le Pape Pie X meurt, décès dont Berthe avait été avertie en 1913, selon son biographe le P. Duffner. Le 6 septembre, Berthe entend une nouvelle dénonciation du Kaiser :

"Je briserai l'hypocrite qui continue à se dresser devant Moi, en voulant Me faire le complice de ses injustices et de ses cruautés." 

Puis, le 10 septembre :

"Un châtiment frappera l'ambitieux sur le sol injustement envahi..." [6]

Vers la fin de la guerre arrive une autre révélation prophétique, datée le 6 septembre 1918, anticipant la proposition de l'Armistice par les Allemands 3 mois plus tard afin d'éviter l'humiliation d'une capitulation. Le Seigneur indique par ailleurs la nature temporaire de cette solution tactique :

"Des dirigeants de cette nation (l'Allemagne) qui voient en face le péril dont elle est menacée, par suite d'une invasion, préparent, par une tactique que nul ne soupçonne, et en plein accord avec celui que Je t'ai désigné [le Kaiser Wilhelm] comme un ennemi fourbe, hypocrite, de Mon Eglise, le geste qui sauvera temporairement cette nation. De ce fait, elle n'aura pas, maintenant, le châtiment qu'elle mérite." [7]

Tragiquement, les messages reçus par Berthe entre octobre 1918 et 1919 se révéleront tout aussi justes. Le 28 octobre, Jésus lui parle de l'impossibilité d'une paix purement humaine sans référence à Dieu :

"Le monde est suspendu au-dessus de cataclysmes absolus. Le désarroi s'effectuera graduellement, et ceux qui chantent maintenant leurs conquêtes, se les verront arracher. Ma justice ne préside pas aux combinaisons de ceux qui travaillent d'une façon intéressée à une paix qui ne mérite en rien ce nom, et qui ne peut être réelle que par ma seule intervention." [8]

Puis en juillet 1919, présageant les événements de 1940 ainsi que l'élément racial dans les conflits à venir:

"On constatera bientôt le peu de stabilité d'une paix établie en dehors de Moi et sans l'intervention de Celui qui parle en mon Nom [c'est-à-dire sans la participation du Pape Benoît XV, dont le plan de paix avait été ignoré par tous les dirigeants européens pendant la guerre, sauf Bienheureux Karl d'Autriche]. La Nation que l'on dit vaincue, mais dont les forces ne sont que passagèrement amoindries, reste une menace pour ta patrie [la Belgique], comme pour la France. Les troubles et les meances vont se propager dans tous les pays. C'est parce que cette paix n'est pas la mienne, que les guerres se rallumeront de toutes parts, guerres intestines et guerres de races.[...] L'humanité va vers une tourmente affreuse, qui divisera de plus en plus les peuples; elle réduira à néant les combinaisons humaines; elle brisera l'orgueil des maîtres de l'heure; elle montrera que rien ne subsiste sans Moi et que Je reste le seul maître des destinées des peuples." [9]

En mars 1921, le Cardinal Granito di Belmonte, ancien nonce apostolique à Bruxelles, transmit au Pape Benoît XV une prophétie donnée à Berthe qui soulignait la menace constante de l'Allemagne et le caractère systématique de la future mise en oeuvre de ses plans :

"Le peuple de proie qui veut la revanche prompte, prépare un mécanisme de destruction qui sera bientôt au point où il le veut. Alors il fondra brusquement et avec son organisation habituelle sur ceux qu'il veut abattre." [10]

Le 21 juin 1921, quelques mois avant la création du Parti National Fasciste par Benito Mussolini et un an avant sa marche sur Rome, Jésus prophétise la chute de l'Italie (qui avait été du côté des Alliés pendant la Première Guerre Mondiale), dirigé par "un homme néfaste" :

"Les événements sont déchaînés en Italie. Leur oeuvre de destruction n'est qu'une faible image du châtiment qui frappera cette nation que dirigera un jour un homme néfaste, dont le but sera adroitement voilé." [11]

Le Seigneur ajoutera un peu plus tard : "Quand sera frappé l'être dont Je t'ai parlé, le cataclysme sera là",[12] donnant un complément le 11 février 1924 (Mussolini étant déjà président du Conseil des ministres) cité dans la réponse du directeur spirituel de Berthe, l'Abbé Decorsant, à une question posée par le Cardinal Granito au sujet du Duce :

(Jésus) : "Ceux qui se laissent dominer par l'orgueil et que l'ambition guide, n'échapperont pas à ma justice. Le régime actuel de cette nation est mû par ses passions. Ce régime, qui semble produire une ère meilleure et à la prolongation de laquelle on croit, échouera dans la déception. L'homme que tu m'as nommé, voile les convoitises de son ambition sous des apparences rassurantes pour l'Eglise. [...]" [13]

La chute de Mussolini et la défaite de l'Italie eurent lieu juste après la mort de Berthe le 26 mars 1943, après de longues années de souffrances physiques. Elle avait survécu assez longtemps pour vivre le drame d'une deuxième invasion allemande de son pays, qu'elle prophétisa le 22 janvier 1940 [14]. Le 4 novembre 1941, dans un des derniers messages dont nous gardons une trace, nous trouvons néanmoins une note d'espérance prophétique concernant la défaite de l'Allemagne et le redressement de son propre pays :

"L'envahisseur reste à ma merci pour le châtiment qu'il mérite. Justice sera faite en tout. Le châtiment gronde ; les chefs le sentent venir ; ils s'en épouvantent et se rendent compte qu'ils ne peuvent plus rien conjurer. C'est alors qu'on verra mon jugement et la puissance de ma volonté. [...] La Belgique redeviendra prospère." [15]

NOTES

[1] R.P. I. Duffner, Bethe Petit, Tertiaire franciscaine (1870-1943) et La Dévotion au Coeur Douloureux et Immaculé de Marie (1947), p. 55. En 1918, Jésus dira à Berthe : "Je fais au milieu de tant de victimes un abondante moisson d'âmes" (ibid., p. 78). L'idée de l'utilité du point de vue de Dieu d'une guerre aussi meurtrière peut nous choquer, mais Berthe Petit n'est pas la seule mystique à recevoir des locutions crédibles allant dans ce sens: une génération plus tard, Soeur Consolata Betrone (1903-1946) recevra des explications analogues. Jésus lui explique qu'il vaut mieux souffrir, même de manière atroce, pendant 2 ou 3 ans lors d'une guerre si la souffance nous ramène à Dieu et donc la vie du Ciel, que de passer toute une vie dans la dissolution et ensuite d'être condamné à la mort éternelle.

[2] Ibid., p. 56. Chez les mystiques (tels que Luisa Piccarreta ou Ste Faustyna Kowalska), la "Justice Divine" signifie avant tout que Dieu nous permet de souffrir les conséquences de nos mauvaises actions suite à notre obstination dans le péché et notre rejet de la Miséricorde de Dieu.

[3] Ibid., p. 57.

[4] Ibid., p. 57-58. Les soldats allemands portaient la devise du Kaiser "Gott mit uns" ("Dieu avec nous") trouvée également sur l'étendard impérial. Wilhelm II, luthérien, avait exclu de la Maison royale des Hohenzollern sa tante après sa conversion au catholicisme. Lors du déclenchement de la guerre il était soutenu par beaucoup de théologiens protestants tels que l'influent Adolf von Harnack, qui signa le "manifeste des 93" en octobre 1914 niant toute responsabilité allemande pour la guerre dans des termes ouvertement racistes, triste préfiguration de l'idéologie du Troisième Reich: "Il n'est pas vrai que l'Allemagne ait provoqué cette guerre. [...] Il n'est pas vrai que nous avons violé criminellement la neutralité de la Belgique. [...] Ceux qui s'allient aux Russes et aux Serbes, et qui ne craignent pas d'exciter des mongols et des nègres contre la race blanche, offrant ainsi qu monde civilisé le spectacle le plus honteux qu'on puisse imaginer, sont certainement les derniers qui aient le droit de prétendre au rôle des défenseurs de la civilisation européenne.

Texte: www.lefigaro.fr/histoire/centenaire-14-18/2014/09/19/26002-20140919ARTFIG00073-l-appel-aux-nations-civilisees-une-hypocrisie-allemande-1914.php;

[5] Ibid., p. 58.

[6] Ibid. Il est frappant de constater que l'armée allemande était encore sur le sol belge et français au moment de la signature de l'Armistice le 11 novembre 1918.

[7] Ibid., p. 80.

[8] Ibid., p. 82.

[9] Ibid., p. 84.

[10] Ibid., p. 87-88.

[11] Ibid., p. 88-89.

[12] Ibid., p. 89.

[13] Ibid., p. 93.

[14] Ibid., p. 109.

[15] Ibid., p. 112.