Peu connu en dehors de l'Italie, le mystique allégué Elio Walter Barillaro, stigmatisé en 1998, fondateur du centre spirituel et biblique "Madone de la Conversion" à Gioiosa Ionica, a acquis une notoriété soudaine en 2020 après avoir publié deux locutions supposées qui faisaient référence aux vaccins anti-covid. Dans le premier message datant du 14 mai 2020, la Vierge Marie aurait qualifié les vaccins anti-covid de "vomissement du Diable". Le second message, reçu le 25 décembre, comprenait le dialogue suivant :
[Elio] : "Chère Mère, des milliards de personnes dans le monde vont prendre le vaccin anti-Covid-19 ; étant donné que c'est le "vomissement du Diable", que pourrait-il leur arriver ?"
[la Vierge] : "Vous devriez former une grande armée de personnes qui prieront intensément, car ce vaccin non seulement ne servira à rien, mais, à terme, peut causer des problèmes plus graves que ceux du virus lui-même, qui est le fruit de la criminalité à des fins politiques, idéologiques et sociales malveillantes."
La publication de ce message a provoqué l'intervention immédiate du diocèse de Letri dans la région de Reggio Calabria. Mgr Francesco Oliva et le vicaire général Pietro Romeo ont publié une circulaire diocésaine affirmant qu'aucune approbation de l'Église n'a été donnée aux prétendues apparitions d'Elio Walter Barillaro, encourageant les fidèles à se distancer du centre spirituel créé par ce dernier, et interdisant toute forme de diffusion dans l'avenir de tels messages dans le diocèse. Depuis cette lettre, les nouvelles publications sur le blog d'Elio Barillaro se limitent à des "méditations" personnelles.
Dans une certaine mesure, ce coup d’arrêt de la part des autorités ecclésiastiques est parfaitement compréhensible, notamment en raison de la position du pape François lui-même, qui a qualifié la vaccination d'"obligation éthique" en janvier 2021 (ironiquement, le message d'Elio Barillaro du 14 mai 2020 avait conseillé quand même aux fidèles de suivre les conseils des virologues et la "Mère Église"). Par ailleurs, l’existence de supposés messages célestes fort douteux, relayés par des sites internet dédiés aux révélations privées et parlant négativement de la vaccination est un phénomène connu. Parmi ces messages anti-vaccination certains peuvent être rejetés d’office comme carrément faux (messages de la pseudo-mystique irlandaise condamnée "Maria Divine Mercy") ou le fruit de l’auto-suggestion, étant plutôt des projections de recherches personnelles sur Internet sur des événements actuels de la part de leurs auteurs humains ("Enoch", John Leary...). Pour s’en convaincre, il suffit d’en constater étant un ton général plus apparenté à FoxNews ou certains sites catholiques militants qu’à la tradition des mystiques approuvés du passé.
Cela dit, signifie-t-il pour autant que l’ensemble des messages attribués par Elio Barillaro à Jésus et la Vierge Marie sur une période de 22 ans, doivent être rejetés d'emblée sans examiner son cas en détail ? Essayant d’aller un peu plus loin, plusieurs questions se posent suite à l’étude des événements concernant le voyant italien et ses messages. Des questions potentiellement troublantes pour ceux qui ne le regardent que comme un simple pseudo-voyant de plus :
i) L'interdiction de diffusion des messages d'Elio Barillaro peut éventuellement se comprendre au plan pastoral ou pour des raisons prudentielles (il faut reconnaître que la présence d’un mystique dont les locutions semblent contredire les propos du Pape est assez problématique pour ses autorités diocésaines !). Pourtant, qu’en est-il de la question plus fondamentale du niveau d'inspiration des communications du voyant ? Est-ce que le Diocèse de Letri essaie de faire comprendre que l’apparente contradiction entre les locutions d’Elio Barillaro et la position actuelle du Vatican serait en soi la preuve ipso facto de la fausseté des messages, alors qu'il n'existe aucune raison canonique de considérer la position du Vatican comme infaillible sur un sujet sanitaire ? Mgr Oliva et la Curie - dont la décision ne fait autorité que dans le contexte du diocèse – ont bien évidemment raison de dire que l'origine surnaturelle des messages d'Elio Barillaro n'a pas été affirmée. Cette déclaration ne constitue cependant pas la condamnation formelle de ses locutions dans leur totalité.
ii) Ceux qui voudraient balayer les locutions d’Elio Barillaro d’un revers de main se heurtent à un obstacle majeur dans le sens où il ne s’agit pas d’un simple blogueur disant sur sa seule autorité recevoir des messages du Ciel, mais d’une figure connue depuis longtemps et accompagnée pendant plusieurs années par un des précédents évêques de Letri, Mgr Giancarlo Maria Bregantini. Comment les sceptiques évaluent-ils les preuves documentaires de phénomènes scientifiquement inexpliqués qui ont été attestés depuis le début des expériences mystiques relatées par Elio Barillaro (voir ci-dessous)? Des phénomènes qui ressemblent fortement à ceux observés dans des cas pris très au sérieux par les spécialistes du mysticisme catholique (lacrimations de sang d’une statuette de la Vierge en 1998, comme à Civitavecchia, stigmates et images "hémographiques" sur des vêtements portés par le voyant, comme dans le cas de Natuzza Evolo, miracles eucharistiques devant des témoins...).
iii) Quant au contenu des "messages" d’Elio Barillaro, ils ressemblent très peu à ceux de voyants autoproclamés tel que John Leary, dont la production presque quotidienne semble prendre la forme d’un commentaire en direct des actualités (signé par un représentant de la frange la plus intransigeante du Parti Républicain aux Etats-Unis, dirait-on). Parlant très peu des événements actuels, les locutions d’Elio Barillaro dégagent plutôt une spiritualité catholique classique ancrée dans les Ecritures et la Tradition, sans trace de théories complotistes. Rien ne permet de les rejeter automatiquement comme le fruit d'un mécanisme d’auto-suggestion. La datation des messages au sujet des vaccins paraît également significative quand on les compare avec les "locutions" de John Leary. Chez ce dernier, les supposées explications du Ciel par rapport aux méfaits de la vaccination (décrits en détail) peuvent être facilement corrélées dans le temps avec la parution sur internet de vidéos de vulgarisation scientifique que le "voyant" aurait pu visionner auparavant : on peut donc affirmer avec certitude que les locutions de Leary critiquant la vaccination n’ont donc pas de dimension prédictive. Par contre, la description (choquante) dans le message du 14 mai 2020 par Elio Barillaro des vaccins comme étant le "vomissement du Diable" est difficilement réductible au simple rabâchage de théories "anti-vax" circulant sur internet, étant donné que la campagne de vaccination en Italie n’a débuté que quelques mois plus tard (le 27 décembre 2020) et qu’il n’y avait que très peu de commentaires sur les vaccins en mai 2020, date à laquelle ils étaient encore en développement.
iv) Que devons-nous penser de la convergence entre les locutions d’Elio Barillaro et des remarques fortement négatives sur les vaccins anti-covid provenant de deux sources prophétiques connues qui semblent avoir prédit la pandémie du coronavirus : Luz de Maria de Bonilla (Costa Rica/Argentine, dont les livres ont reçu l'Imprimatur), Gisella Cardia (voyante des apparitions de Trevignano Romano qui sont actuellement sous surveillance de l'Eglise mais ne sont certainement pas condamnées). Ou encore le prêtre canadien Michel Rodrigue (message du 31 décembre 2020) ainsi qu’une voyante d’origine slovène domiciliée en Australie, Valentina Papagna. En mars 2020, Valentina avait publié les détails d’une vision de la fabrication du SARS-CoV2 dans un laboratoire à Wuhan : le 27 décembre 2020 elle émet une sévère mise en garde contre la vaccination attribuée à Jésus – une mise en garde très semblable à celle transmise par Elio Barillaro deux jours plus tôt. Comment expliquer ces ressemblances entre sources complètement indépendantes ? Et retournant la question, comment expliquer le fait que, par rapport à la souffrance indéniable causée par la pandémie, les révélations privées les plus solides préconisent toujours la foi et la prière, mais jamais les vaccins ?
Les expériences mystiques d’ Elio Walter Barillaro commencent pendant son service militaire en 1968, lorsqu'il affirme avoir vu un Crucifix dans la chapelle militaire s'animer. Elio dit avoir entendu les paroles, répétées à trois reprises : "Mon fils, veux-tu te sacrifier pour moi ?" Suite à la réponse affirmative d’Elio, Jésus Crucifié continue : "Si tu veux, je te ferai devenir mon temple : et le temple, tu le sais, se construit en commençant par les fondations." À ce moment-là, deux rayons lumineux sortent du crucifix et transpercent les pieds d'Elio, provoquant un saignement abondant qui ensuite disparaît de façon inexpliquée. Étrangement, Elio passe les 30 années suivantes dans un rejet constant de Dieu, se disant "athée" (malgré les prières de sa femme Rosa Maria), jusqu'à ce que le 21 mars 1998, il remarque une petite statue de Notre-Dame de Lourdes (achetée par Rosa Maria lors d'un pèlerinage en 1994) qui semble bouger et qui pleure des larmes de sang lorsqu'il la prend dans ses mains. Elio et Rosa Maria présentent la figurine à un prêtre qui était convaincu qu'il s'agissait d'un événement surnaturel. Après une deuxième lacrimation, l'évêque local, Mgr GianCarlo Maria Bregantini, en est informé et demande une analyse médicale du liquide en question. Selon le laboratoire, il s’agit de "sang humain sans hémoglobine", donc d’un phénomène scientifiquement inexpliqué (étant donné que l'hémoglobine est nécessaire pour que le sang soit rouge). Mgr Bregantini devient le guide spirituel d'Elio Barillaro jusqu'à son transfert, dix ans plus tard, à l'archidiocèse de Campobasso.
Peu de temps après ces lacrimations, pendant la Semaine Sainte 1998, Elio rêve de la Vierge Marie qui lui dit : " Je voudrais que tu ressembles à mon Fils ", après quoi il expérimente la stigmatisation de ses mains (initialement sans comprendre le phénomène ni l'accepter) :
" Je refusais d'accepter ces choses. Cela était dû au fait que je n'étais pas simplement agnostique, c'est-à-dire "indifférent" à l'égard des choses divines, mais que j'éprouvais même un sentiment d'aversion : il y avait en moi un refus réel, franc, de Dieu. Mais peu après est arrivée ma "conversion", qui m'a apporté une indescriptible paix de l'esprit".
Le Vendredi saint 1998, les marques de la couronne d'épines apparaissent sur sa tête d’Elio Barillaro qui, à 15 heures, ferme soudain les yeux, prenant l’apparence d’un mort ; en rouvrant les yeux, les stigmates ont disparu. Le Samedi Saint, tombant en état de transe, il écrivit deux phrases en latin, une langue qui lui était inconnue (on pense ici aux expériences analogues de Madeleine Aumont à Dozulé). Il s’agit de phrases clairement apparentées à la Bible mais – fait intéressant – qui ne sont pas des citations directes (possibles à mémoriser auparavant). Ces phrases sont expliquées par le père Michele Ceravolo et transmises à l'évêque.
"Resistite fortes in fide et vigilate" ("Forts dans la foi, résistez et veillez" (cf. 2 Pierre)
"Qui ingreditur sine macula non faciet proximo suo malum" ("Celui qui marche sans défaut ne fera pas de mal à son voisin." (Psaume 14).
Le 14 mai 1998, Elio dit avoir une apparition de la Vierge avec une colombe de la même variété que celle vue par les enfants bergers à Fatima : au cours de cette apparition, Elio reçoit son premier message de la part de la Madone.
Récit autobiographique : http://madonnadellaconversione.blogspot.com/2008/08/elio-racconta-la-sua-storia.html
Entretien (2020) : https://mediterraneinews.it/2020/03/12/intervista-ad-elio-barillaro-mistico-di-gioiosa-ionica/
Photos (par Emilio Barillaro) : https://www.lensculture.com/projects/376775-stigmate
Miracles eucharistiques (et témoignage du P. Pino Fazio) : http://madonnadellaconversione.blogspot.com/2008/08/miracoli-eucaristici_16.html
Témoignage du P. Francesco Carlino, Université Pontificale Grégorienne, Rome, père spirituel d’Elio Barillaro :